Europe
Il est impossible d'aborder cette année 1999 sans évoquer l'Europe. Cet "événement" ne devrait pas nous laisser indifférents.
Un proverbe chinois dit :" Quand le sage montre la lune, l'imbécile regarde le doigt ".
Pourquoi ? Parce que, d'évidence, il a un esprit à " courte vue. "
Louis XVI a noté sur son carnet, le 14 Juillet1789 : "Rien"
Pourquoi ? Parce qu'il n'avait pas de vision globale pour l'avenir de la France.
Il se contentait - et il en était content - de conserver la France dans le régime qui
était le sien. Et c'est vrai que,même si tout n'était pas rose, oh, non! la France était
une des grandes puissances mondiales. Donc surtout, ne rien changer. C'est vrai, et
c'est normal, les êtres humains (comme les animaux) aiment bien rester dans leurs "
repères" dans les limites connues du territoire, des habitudes, des privilèges, des
frontières. Certains, plus que d'autres, aiment bien (trop!) les bornes.Devrait-on dire
que leur esprit, lui aussi, est borné ? L'idée de figer la nation Française, d'arrêter son
évolution peut être séduisante, mais pourquoi à notre époque?Pourquoi pas (dans le
désordre et on peut choisir d'autres moments) quand le Pape était en Avignon,
quand les Espagnols occupaient les Flandres jusqu'à la Bourgogne, quand l'Alsace-Lorraine
était Allemande ou la Savoie au Royaume de Sardaigne-Piémont, ou bien
quand les Sarrasins tenaient quasiment le midi de la France jusqu'à la Loire, quand
les Anglais occupaient l'Aquitaine et le Nord ? Aux frontières de l'Empire de
Napoléon 1er ? À son apogée ou après le traité de Vienne ? Pourquoi pas en l'an
800 ? Charlemagne avait pratiquement réalisé l'union Européenne avec une capitale
fixée déjà par lui, le Roi des Francs !, à Aix-la-Chapelle dans ce qui sera bien plus
tard l'Allemagne! Depuis toujours la France a changé de frontières, de régime, d'alliances etc...
Or, l'idée
d'une France figée, refermée sur elle-même et jalouse de sa souveraineté (alors que nous
sommes en interdépendance quasi totale avec les autres pays du monde), revient comme une
idée fixe dans les arguments des opposants à l'Europe.
Si l'on s'accroche à une idée fixe, il ne faut pas s'étonner de ne pas avancer ! En 1789,
la révolution se serait-elle faite si on avait consulté les sondages ? Si on avait écouté
les arguments : Est-ce que ça va favoriser la croissance, créer des emplois ?
Il y avait
un projet qui s'enracinait dans un rêve, un idéal mobilisateur si fort que presque tout
le peuple a suivi sans s'arrêter aux arguments de l'intendance, si importants soient-ils.
Oh! tout ne fut pas bon, loin de là, et il n'en sortit pas que des avantages mais, depuis,
nous vivons avec ces idéaux comme devise républicaine. Ils sont loin d'être entièrement
réalisés, c'est bien la preuve que " ça pressait " de commencer à les mettre en œuvre !
Nous avons
devant nous un projet à l'échelle européenne, un projet sans précédent dans notre Europe
de petites nations. Le seul événement comparable, me semble-t-il, s'est produit,
il y a un peu plus de 200 ans.
Des états, issus de colonies anglaises et françaises, se faisaient la guerre avec de "bonnes
raisons" (Il y a toujours de bonnes raisons pour cela). Ils décidèrent, non sans déchirement,
de devenir les États Unis d'Amérique. ;Cela ne leur a pas mal réussi.
Cependant,
depuis ce temps, il y a certainement encore plus de différence de culture, de manière
de vivre, de penser, entre un Texan et un californien ou bien un habitant du Dakota ou
du Montana qu'entre un Cévenol et un Allemand ou un Hollandais qui viennent de plus en
plus nombreux se fixer chez nous.
Sur le territoire de l'Europe de ces 2 derniers siècles (pour ne pas remonter
plus haut) Il n’y eut peut-être pas 20 ans de paix ! Il y a toujours eu des conflits
entre états, il en existe encore. En deux siècles, combien de millions de morts ?
Les deux dernières guerres mondiales ont commencé par des conflits européens hors de nos
si chères frontières françaises qui ne nous ont pas protégé. La France a subi, deux fois,
la guerre sur son sol et elle a payé un lourd tribu. C'est cette "souveraineté" que nous
regrettons ?
Quelle bizarre
nostalgie ! Plutôt que de préparer éternellement la revanche (comme une tradition historique
à perpétuer) des européens décidèrent de s'unir. Quel mérite, quel courage eurent-ils,
quelques années seulement après la plus horrible des guerres ! Ah ! Il devait en exister
des arguments raisonnables, censés, etc... pour s'opposer à cette idée. Heureusement,
ils ne les ont pas écoutés.
Nous sommes
devant ce projet d'une Europe à construire, qu'on nous montre du doigt et nous arrêterions
notre regard au doigt, c'est-à-dire à tous les problèmes d'avant le décollage ? Sommes-nous
incapables de sortir de nos pantoufles et sommes-nous, vraiment, un" vieux" continent ?
Ce projet,
si neuf, va faire de l'Europe un nouveau monde. Oh non, ce ne sera pas le Paradis !
C'est une entreprise humaine, donc imparfaite et qui fait naître des craintes bien
compréhensibles, comme chaque grande mutation à la quelle l'humanité a été confrontée.
Mais
notre monde actuel est-il si parfait et si enviable? Faut-il le laisser tel quel à
nos enfants, avec conflits, chômage, misère dans le paquet cadeau, ou bien faut-il
tenter de l'améliorer ne serait-ce qu'un peu ?
Bien évidemment
, il ne faut pas faire n'importe quelle Europe. Il faut avoir une exigence de démocratie,
de social, de prise en compte du citoyen européen, avec un parlement fort et pas seulement
une Europe du marché et des capitaux. C'est à nous de choisir et de décider de ce
que nous voulons ; Il est donc important de s'y intéresser. On sait que cela modifiera
certaines choses, mais on ne peut pas affirmer qu'il y aura beaucoup de changements,
ou peu, lesquels, notables ou pas.
Cependant, nous savons qu'en ne faisant rien, les choses ne s'amélioreront pas.
Il n'y a aucune certitude qui nous permette de dire que nous allons entrer dans l'âge d'or ;
on ne sait pas si nous allons y gagner sur tous les plans, mais nous pressentons tous que,
si nous ne faisons pas l'Europe maintenant, nous ne pèserons pas lourd dans le monde.
Ceux qui jetaient les bases d'une cathédrale, savaient qu'ils ne la verraient pas finie.
Il a fallu plusieurs générations mais, chacune a apporté sa pierre à l'édifice et les
cathédrales se dressent dans notre ciel.
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